Vivifier la mémoire de l’Éducation nouvelle : hommage à Janusz Korczak

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Il y avait donc des trésors qui dormaient depuis le milieu des années 20 !


Comme je l’avais écrit dans plusieurs courriers à différentes personnes du GFEN ou du LIEN ; j’ai eu l’occasion de découvrir quelques archives de collaboratrices de Janusz Korczak, dans le champ de l’éducation nouvelle en Pologne, grâce au réseau korczakien bien documenté.

(Plusieurs sites à consulter :

http://korczak.fr/

http://www.memoire-net.org

et sur le site du GFEN.)

Ma curiosité me conduisit à consulter les documents originaux (lettres – revues New Era / L’Ère Nouvelle…) qui sont entreposés depuis fort longtemps au Bureau International de l’Éducation (BIE) de Genève. Beaucoup de ces écrits de polonais(e)s étaient adressés à Piaget, Ferrière…
Il y avait donc des trésors qui dormaient depuis le milieu des années 20 !

 Que de similitudes avec les questions, les préoccupations dont nous débattons aujourd’hui, dans le cadre de la Refondation de l’École dans nos différents pays.

Il m’a donc semblé intéressant de porter à votre connaissance les idées et pratiques d’éducation nouvelle de la Pologne d’après guerre 14-18, après la création de la Ligue Internationale de l’Éducation Nouvelle (1921). Elles sont d’une actualité brûlante. Nous en sommes les héritiers sans le savoir.
De mes lectures, j’extrais quelques idées fortes qui ont « rayonné, grâce à l’aide fraternelle » pour reprendre la pensée de Piaget à l’égard d’Helena Radlinska (présidente de la Section Polonaise de la Ligue Internationale de l’Éducation Nouvelle).
Dans un pays comme la Pologne, qui reconstruisait son indépendance et son unité nationale ; les pionnières se sont appropriées les idées de ceux et celles qui les ont précédés dans le champ de l’Éducation Nouvelle.

Des priorités et axes se dégagent :

  • Nécessité de construire des formations spécifiques avec des orientations issues du champ de l’éducation nouvelle, en particulier dans les établissements secondaires, auprès des populations marginalisées socialement parlant, ayant des problèmes de santé comme la tuberculose. Ceci par une « pédagogie sociale ».
  • Développer l’esprit critique, provoquer les échanges, le questionnement, la mise en recherche par des méthodes de « laboratoire ». Ceci n’est pas sans rappeler la notion de Recherche/Action de l’Institut National de la Recherche Pédagogique dans les années 80, en France.
  • Les idées d’Éducation nouvelle sont au cœur de la construction des savoirs en « se débarrassant de la routine scolastique, en déclarant la guerre aux méthodes livresques verbales qui produisent un enseignement passif où seul le professeur est actif. » Cette citation provient « d’une recommandation des autorités scolaires polonaises elles-mêmes, dans la préface du programme des écoles secondaires qui engagent les enseignants à suivre les tendances de la pédagogie nouvelle ». (Vous vous rendez compte du pari, de l’ambition !]
  • Suppression des examens amorcée en certains lieux, « parce qu’appuyés sur le privilège de la fortune des parents. »
  • Dans cette Pologne dévastée, choix de certaines villes qui servent de laboratoires au développement des idées d’Éducation nouvelle. Il s’agit d’un effort sans précédent vers « l’émancipation intellectuelle » pour les générations futures afin que chacun, chacune devienne « défricheur ». Importance de mise en circulation des pratiques par des revues ou livres, journaux d’ici et d’ailleurs.
  • C’est « par les maîtres futurs que commence la transformation d’un pays. » (cf. pour nous Éducation nouvelle France, l’expérience du Tchad ou du XXème arrondissement À Paris).

 Ces pratiques n’ont de sens que si elles s’inscrivent dans des projets coopératifs

où les élèves sont organisés en républiques d’enfants (« self government ») gérées de manière démocratique en tous domaines comme la gestion de la bibliothèque, l’édition de revues/journaux, les achats de livres et de matériels, la gestion des repas, les liens avec les familles, le parlement et tribunal d’enfants (cf. Korczak).

Selon des membres du BIE en visite en Pologne durant les années 30, ce pays semble être au tout premier rang en matière de coopération scolaire et self-government, car « la pédagogie pratique doit résoudre les problèmes nouveaux ».

Des richesses enfouies comme celles que je viens de découvrir, nous en avons aussi !

Sur le plan éthique et social, l’école doit veiller à l’entraide financière des élèves en cas de difficultés. On voit aussi, que les enfants sont reconnus comme sujets de droits. Cette vision où ils sont acteurs de leur éducation est bien celle de Janusz Korczak qui inspira grandement des personnes comme Helena Radlinska, Maria Grzegorszewska, Maria Falska… et dont le travail et les lettres sont conservées au BIE.

Dans cette période de crise et sans perspectives, il y a urgence à les faire sortir de l’oubli pour en dégager les enjeux communs. Sachez que je ne manquerai de me battre avec mes ami(e)s polonaises pour que cela devienne une mémoire et des combats partagés.
Cela fait partie de notre Histoire depuis 1921 et ne doit pas rester lettre morte.

Colette Charlet. (France)

 

Post-Scriptum

N.B. Pour l’instant, je n’ai enregistré que quelques documents. Il y a des problèmes de droits, mais je pense qu’avec la négociation entre différentes organisations et le BIE qui dépend de l’Unesco, nous parviendrons à produire des publications. On disait souvent que L’Ére Nouvelle touchaient des publics francophones ou anglophones (New Era . Les pays hispanophones avaient aussi leurs publications qui se déclinaient en Nueva Era de même que dans d’autres pays comme ceux de l’Est.