Le harcèlement d’origine scolaire réduit par la classe immune (Ch.Pepinster) (GBEN)

Le harcèlement d’origine scolaire réduit par la classe immune

 pepinstercharles@yahoo.be

Un sujet titille ma petite cervelle, me tarabuste même : le rapport entre le degré de violence institutionnelle dans une école et le taux de harcèlement y constaté ; ma conviction est faite puisque j’ai initié, il y a 33 ans, une école publique belge  (communale à Buzet-Floreffe) où le harcèlement est quasi inexistant, car non violente, car sans notes, ni donc de bulletins habituels, sans punitions, sans redoublements, sans dénonciations aux parents (sauf cas exceptionnels)  mais avec des activités de recherche créatives et solidaires en groupes souvent hétérogènes, des devoirs au choix non obligatoire à partager le lendemain pour instruire les autres, l’usage du portfolio, du théâtre, de la musique, de la classe du dehors, ETC., bref, une école surtout culturelle, largement déscolarisée.

Quand cette culture de paix, de liberté, d’entraide dans tous les apprentissages a été intensément vécue, c’est le groupe des élèves lui-même qui s’est autorégulé, qui a éteint les conflits naissants, qui a largement empêché un harcèlement de se développer ; il a produit les anticorps à la violence, car il a intégré profondément la notion de solidarité. Là, pas de règlement, un seul impératif ; l’entraide.

 

Une école immune

Une classe, une école, ce sont des corps vivants, donc exposés, comme le corps humain, à des désagréments. L’oncologie et la pédagogie semblent se rejoindre par le remède appelé l’immunothérapie. Comme le cancer est entravé par les anticorps qu’il se donne, le harcèlement scolaire est enrayé par une autodéfense du groupe. Cependant, si la médecine injecte un produit largement salvateur, la pédagogie doit recourir à la persuasion lente, à commencer par celle des professeurs. Ceux-ci sont d’anciens élèves imbibés donc de violence scolaire banale, comme la notation arbitraire, les punitions sans recours (le fait du Prince), les redoublements qui arrachent. Sans un intense travail sur soi, le professeur reproduit ce qu’il a vécu comme élève. Dans ce climat, bien des enseignants stigmatisent publiquement tel ou tel élève soit en le valorisant, soit en l’humiliant…. ce que les autres élèves perçoivent. Ainsi, le fort en thème et le cancre ou le rebelle sont-ils des cibles pour les harceleurs contrariant ou épaulant l’autorité. J’ai inspecté les écoles pendant dix-huit ans et dans l’une d’elles, j’ai constaté, dans chacune des douze classes, qu’il y avait ce que les enseignants appelaient le banc d’infamie. J’ai souvent pris place à côté de l’exclus et j’ai été surpris d’entendre le paria avouer sa culpabilité. Il se disait rejeté par les autres.

 

Au-delà de l’école                                                              

Les réseaux sociaux  prennent le relais du harcèlement dont l’école est le terreau ; donc si ce fléau est annulé par une action longue du corps professoral imprégné de non-violence institutionnelle et de solidarité, le cyberharcèlement tombera en désuétude. Faute de substrat, la plante invasive se meurt.

Heureusement, d’autres remèdes existent conjointement          

Comme le cancérologue utilise, outre l’immunothérapie,  la chimio, les rayons, voire la chirurgie,  l’entourage éducatif du harcelé prodigue les soins de spécialistes,  psychologues et autres médecins de l’âme. Un changement d’école est parfois nécessaire et même une action judiciaire peut être requise pour punir  et dissuader  les persécuteurs. Des  campagnes de sensibilisation  à la détresse des tourmentés et aux mesures de prévention peuvent se montrer utiles, car certains cas sont extrêmes. Ma nièce adolescente, sans doute harcelée, s’est suicidée sans aucun signe précurseur ; aucune enquête n’a été diligentée pour expliquer le drame. Que son  exemple éclaire !

Je ne puis m’empêcher de penser que, si ma chère Perrine avait baigné dans la douceur d’une vigilance développée par ses condisciples à l’instigation de ses professeurs, elle serait restée pour tous ce rayon de lumière.

Bref

Une école immune, gage de non-harcèlement, est possible partout, car tous les éducateurs sont capables de construire un monde fraternel.

Charles Pepinster

 pepinstercharles@yahoo.be